Collaborer pour mieux innover

Meilleur brassage d’idées, mise en marché plus rapide, réduction des coûts et répartition des risques : les avantages de travailler avec des partenaires externes pour innover sont nombreux. Vous seriez donc fou de vous en priver, comme en témoignent plusieurs entreprises.

C’est connu, les Québécois adéquatement vaccinés courent beaucoup moins de risque d’attraper la COVID-19, d’aller à l’hôpital et d’en mourir. Ce qui est moins connu, c’est qu’ils doivent cette protection à l’innovation ouverte, un processus dans lequel des pharmaceutiques concurrentes ont collaboré et partagé leurs connaissances sur le coronavirus afin de produire rapidement un vaccin. 

Cette démarche collaborative inspire de plus en plus d’entreprises dans le monde pour trouver des solutions à des problèmes ou pour développer de nouveaux produits ou services.

Le Québec n’échappe pas à cette tendance, notamment dans les secteurs de l’aérospatiale et de la biopharmaceutique. S’il n’existe pas de statistiques pour quantifier avec précision l’ampleur de l’innovation ouverte, des chiffres montrent qu’il se passe beaucoup de choses sur le terrain dans plusieurs industries.

« Les regroupements sectoriels de recherche industrielle (RSRI) ont appuyé des projets collaboratifs d’une valeur de 750 millions de dollars entre 2015 et 2020 », affirme Stéphane Ruggeri, conseiller en technologies et en innovation à PRIMA Québec, l’un des neuf RSRI dans la province qui soutiennent et animent l’écosystème des matériaux avancés.

La raison pour laquelle on voit se multiplier les initiatives d’innovation ouverte sur le terrain est fort simple, disent des spécialistes et des sources de l’industrie : les entreprises y voient de multiples avantages.

 

Exposition à des idées neuves

Innover avec d’autres entreprises élargit leurs perspectives, affirme Elsa Bruyère, cofondatrice et facilitatrice en innovation ouverte à la Fabrique_A, un organisme sans but lucratif qui aide les entreprises à optimiser leurs projets en transformation agile, en culture d’expérimentation et en innovation continue.

« Ça donne la capacité d’avoir accès aux meilleures pratiques. Nécessairement, vous allez bénéficier de ce que les autres ont fait », dit-elle. 

C’est la raison pour laquelle Rio Tinto Fer et Titane (RTFT) embrasse l’innovation ouverte. La multinationale la voit comme « outil complémentaire » à ses activités de recherche et développement (R-D) traditionnelles, notamment en matière de résolution de problèmes.

« Elle offre la possibilité d’aller au-delà de notre propre réseau et ainsi d’avoir de meilleures chances de trouver un éventail de solutions à un problème donné », explique Didier Arseguel, vice-président à la technologie à RTFT.

L’entreprise a d’ailleurs utilisé cet « outil » pour créer de l’aluminium-scandium, un alliage prisé par les industriels. Pour y arriver, RTFT a fait travailler ses chercheurs de son centre de technologie et minéraux critiques, à Sorel-Tracy, avec ceux du centre de R-D de Rio Tinto Aluminium (une autre division de la multinationale anglo-australienne), à Arvida. 

C’est le même son de cloche du côté d’Excel-Serres, un producteur de tomates en serre de Saint-Damase, en Montérégie. La PME participe actuellement au Défi innovation ouverte : serres, un programme lancé par InnovHQ (une division d’Hydro-Québec) et par Cycle Momentum pour accroître l’autonomie alimentaire du Québec et accélérer la transition énergétique. Sa propriétaire, Dominique Fortier, espère y trouver à terme des solutions concrètes afin « de mieux contrôler la lumière, la chaleur, l’humidité et la prolifération des maladies ».

Au terme d’un de tri de quelque 1 500 entreprises, 15 d’entre elles se sont finalement retrouvées en finale, puis 5 ont été retenues. Ce processus lui-même est aussi l’occasion de faire de belles découvertes, selon Patrick Gagné, PDG de Cycle Momentum. Même ces 10 entreprises non sélectionnées nous donnent un accès à un réseau important », fait-il remarquer.

Grâce à ce projet d’innovation ouverte, le PDG d’InnovHQ, Simon Racicot-Daignault, s’attend à plusieurs retombées positives en matière de productivité et d’efficacité énergétique pour l’ensemble des serristes du Québec. « Ça coche beaucoup de cases, dit-il. Pas dans un esprit de rentabilité, mais plutôt pour créer de la valeur. »

 

Réduction des risques

Innover en groupe permet aussi de réduire les risques de chacune des entreprises impliquées, affirme Louis-Félix Binette, directeur général du Mouvement des accélérateurs d’innovation du Québec. 

Lorsqu’elle s’implique dans projet collectif, une entreprise a déjà pris des risques de son côté pour développer par exemple un concept ou un produit qui s’intégrera à ce projet. En revanche, si elle avait travaillé seule sur ce même projet, elle aurait alors assumé tous les risques. « L’innovation ouverte permet donc de réduire les coûts pour prendre des risques ou de prendre plus de risques à coût égal », souligne Louis-Félix Binette. 

Miguel Garcia Claro, responsable du développement durable des produits chez Bombardier, constate que l’innovation ouverte permet de réduire les risques en dégageant les meilleures solutions de conception en amont du processus d’innovation.

« Ça réduit le nombre d’options, mais elles sont plus matures », précise-t-il. Bref, les idées retenues ont une probabilité plus grande de fonctionner que de faire long feu.

Aussi, on comprend pourquoi les points de vue de ses partenaires (des fournisseurs aux clients) sont essentiels pour améliorer le cycle de vie de l’innovation des produits de Bombardier et pour réduire leur empreinte écologique.

 

Diminution des coûts et des délais

L’innovation ouverte permet aussi de réduire les coûts d’innovation et de commercialisation de plusieurs entreprises, sans parler d’une diminution des délais pour la mise en marché.

C’est notamment le cas chez e2ip Technologies, une société montréalaise qui élabore des solutions de surfaces intelligentes pour diverses industries et qui fait systématiquement de l’innovation ouverte. « Ça nous permet de diminuer le temps pour amener une idée au marché, et de réduire les coûts d’innovation et de commercialisation d’au moins 50% » affirme son PDG, Éric St-Jacques.

Pour l’essentiel, c’est le partage de l’expertise, des ressources (humaines et financières) et des tâches qui permettent de récolter ces gains.

L’entreprise collabore avec des centres de recherche, comme le Conseil national de recherches du Canada (CNRC), des partenaires d’affaires (par exemple, des firmes d’ingénierie), des clients et des …compétiteurs.

« Il est même logique de collaborer avec des concurrents », assure le patron de e2ip, sans pouvoir toutefois donner des détails en raison d’ententes de confidentialité.

 

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