Et si Trudeau proposait à Biden un Buy North American?

La prochaine administration Biden misera fortement sur le nationalisme économique et le renforcement du Buy American pour relancer l’économie américaine dans les prochaines années, ce qui aura à coup sûr un impact sur nos entreprises exportatrices.

Plusieurs contre-attaques sont possibles, mais la meilleure serait sans doute de proposer une alternative qui tiendrait compte des intérêts de tout le monde : un Buy North American, qui inclurait le Canada et le Mexique.

Vous avez bien lu : une politique d’achat «local» nord-américaine, qui intégrerait les marchés publics (les approvisionnements des gouvernements) du Canada, des États-Unis et du Mexique. L’idée serait d’étendre géographiquement le concept de l’actuel Buy American, une disposition qui favorise les achats de biens du gouvernement fédéral destinés à l’usage public (articles, matériaux ou fournitures) dont la valeur est supérieure au seuil des microachats.

Cette politique «continentale» serait une suite logique à l’intégration progressive des économies et des chaînes de valeur de l’Amérique du Nord depuis des décennies, et ce, du Pacte de l’automobile (1965 à 2001) à l’Accord de libre-échange nord-américain (depuis 1994) en passant par l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis (1989-1994).

C’est le ministre des Affaires étrangères du Canada, François-Philippe Champagne, qui a récemment lancé cette idée de Buy North American dans un entretien accordé au réseau CTV et dans un reportage de Radio-Canada.

Au moment de mettre cette analyse en ligne, son cabinet n’avait pas répondu à notre demande d’interview afin d’en savoir plus à ce sujet.

Véronique Proulx, PDG de Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ), estime que l’idée proposée par le ministre Champagne est «intéressante», même si le député de Saint-Maurice—Champlain a peu développé le concept à ce jour, du moins publiquement.

«Les chaînes d’approvisionnement sont très intégrées en Amérique du Nord. Les entreprises nord-américaines sont avant tout en concurrence avec l’Asie. Si on renforce notre intégration économique, on va gagner ensemble», dit-elle.

On va se dire les vraies affaires : amorcer des discussions à propos d'un éventuel Buy North American ne sera pas la priorité de l’administration Biden à compter du 20 janvier.

Par contre, c’est le moment de sensibiliser les Américains à ce sujet pour faire germer cette idée, comme l’a fait du reste l’ex-premier ministre Brian Mulroney, au milieu des années 1980, lorsqu’il a proposé au président américain Ronald Reagan de conclure un accord de libre-échange.

On connaît la suite.

Les négociateurs canadiens et américains ont amorcé des pourparlers en mai 1986, pour arriver à une entente en octobre 1987. Mulroney et Reagan ont par la suite signé l’accord le 2 janvier 1988, qui est officiellement entré en vigueur un an plus tard, le 1er janvier 1989.

C’est donc allé relativement vite pour conclure une entente.

Imaginez pour négocier une politique Buy North American, qui serait beaucoup moins complexe, même s’il y aurait sans doute de bonnes discussions sur certains enjeux.

Techniquement possible

La bonne nouvelle : techniquement, il serait possible de conclure une telle entente, selon deux avocats spécialisés en droit du commerce international, Xavier Van Overmeire, associé chez Dentons Canada, et Bernard Colas, associé chez CMKZ.

La cohabitation d’un éventuel Buy North American avec les accords de libre-échange que le Canada a déjà conclus, comme l’Accord économique et commercial global (AECG) avec l’Union européenne, est un enjeu très important.

C’est sans parler de l’Accord de libre-échange canadien (ALEC), qui encadre le commerce entre les provinces.

Or, souvent, les marchés des achats publics visés par ces traités de libre-échange — incluant l’Accord sur les marchés publics (AMP) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) — et les marchés visés par le Buy American ont une couverture différente, explique Xavier Van Overmeire.

Pour lire l'article complet : https://www.lesaffaires.com/blogues/zoom-sur-le-quebec/et-si-on-proposait-a-joe-biden-un-buy-north-american/621114
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